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قديم 02-05-10, 03:17 PM   #2

sanaafatine

نجم روايتي

 
الصورة الرمزية sanaafatine

? العضوٌ??? » 106902
?  التسِجيلٌ » Jan 2010
? مشَارَ?اتْي » 5,219
?  نُقآطِيْ » sanaafatine has a reputation beyond reputesanaafatine has a reputation beyond reputesanaafatine has a reputation beyond reputesanaafatine has a reputation beyond reputesanaafatine has a reputation beyond reputesanaafatine has a reputation beyond reputesanaafatine has a reputation beyond reputesanaafatine has a reputation beyond reputesanaafatine has a reputation beyond reputesanaafatine has a reputation beyond reputesanaafatine has a reputation beyond repute
افتراضي

3.


Stefan, à la fenêtre de sa chambre, contemplait les premières lueurs de l'aube qui teintaient le ciel de nuances rosées. La trappe au-dessus de sa tête laissait entrer un vent frais et humide. C'était précisément à cause de cette trappe permettant d'accéder au belvédère, sur le toit, qu'il avait loué cette pièce. Et si, à cette heure matinale, il était habillé, ce n'était pas parce qu'il venait de se lever. En réalité, il ne s'était pas couché : il venait tout droit de la forêt, comme en témoignaient les débris de feuilles mortes encore collés à ses chaussures.
Se souvenant de l'attention que les autres élèves avaient accordée à son apparence, il les ôta méticuleusement. Il portait toujours les vêtements les mieux coupés, non par coquetterie, mais pour suivre les conseils de son tuteur : « Chacun doit s'habiller selon son rang, en particulier un aristocrate : c'est faire preuve de courtoisie envers les que de s'attacher au respect de cette règle.» Il s'était évertué à rester cligne de la place qu'il occupait autrefois dans la société.
Il se rappelait sa propre expérience d'écolier avec un sentiment étrange. Parmi les flots d'images qui surgissaient dans sa mémoire, l'une d'elles l'obsédait: l'expression de son père lorsque son frère Damon lui avait annoncé qu'il ne remettrait plus les pieds à l'université. La colère paternelle avait été telle que Stefan n'en avait oublié aucun détail.
- Comment ça, tu n'y retourneras pas ?
Giuseppe était un homme juste que les frasques de son fils aîné rendaient furieux, ce qui ne semblait pas affecter Damon, occupé à se tapoter tranquillement les lèvres avec un mouchoir de soie couleur safran.
- Je pensais que vous comprendriez une phrase aussi simple, père. Voulez-vous que je vous la répète en latin ?
- Damon..., intervint Stefan, profondément choqué par un tel manque de respect.
Son père l'interrompit :
- Et tu crois que moi, Giuseppe, compte de Salvatore je pourrais affronter mes amis quand ils sauront que mon fils est un scioparto ? Un bon à rien, un oisif qui n'apporte aucune contribution à Florence ?
Tandis que les serviteurs s'éclipsaient, effrayés par la rage de leur maître, Damon affrontait le plus calmement du monde son regard.
- Mais bien sûr, père. Si on peut appeler « amis » les gens qui font des courbettes dans l'espoir d'obtenir de l'argent.
- Sporco parasito ! hurla Giuseppe en se levant d'un bond. Gaspiller ton temps et mon argent à jouer, à te battre et à courir les femmes ne te suffit plus ? C'est à peine si son secrétaire et tes professeurs particuliers t'empêchent d'échouer dans toutes les matières ! Et tu pousses le vice jusqu'à m'humilier complètement !
- Est-ce pour t'adonner à la chasse et à la fauconnerie ? demanda-t-il en attrapant le menton de Damon pour plonger ses yeux courroucés dans les siens.
Stefan était bien forcé de reconnaître que son frère ne manquait pas de cran. Même dans cette inconfortable adminhelpure, il ne perdait rien de sa noblesse ni de son élégance. Portant un manteau bordé d'hermine et des souliers de cuir souple, une somptueuse coiffe posée sur ses cheveux de jais, il affichait un air profondément arrogant.
« Tu es allé trop loin, cette fois, se dit Stefan en observant les deux hommes se toiser. Tu n'arriveras pas à le faire céder. »
Au même moment, un léger bruit lui fit tourner la tête. Katherine, la fille du baron Von Schwartzschild, se tenait sur le seuil. Après une longue maladie, son père lui avait fait quitter les froides contrées des princes allemands dans l'espoir que les paysages italiens faciliteraient sa convalescence. Dès son arrivée, ses yeux couleur lapis-lazuli et ses longs cils blonds avaient bouleversé Stefan.
- Excusez-moi, je ne voulais pas vous déranger dit elle d'une voix douce et cristalline.
Elle fit mine de s'en aller
- Non, non, reste, la retint Stefan.
Il aurait voulu s'approcher d'elle pour lui prendre la main, mais devant son père, il n'osa pas. Il se contenta de lui lancer un regard insistant.
- Oui, tu peux rester, confirma Giuseppe.
Il avait lâché Damon et semblait avoir retrouvé son calme. Après avoir remis en place les lourds plis de son manteau bordé de fourrure, il s'approcha de la jeune fille.
- Ton père devrait bientôt rentrer. Il sera ravi de te voir. Mais tu es bien pâle, ma petite. Tu n'es pas souffrante, j'espère ?
- Je suis toujours pâle, vous savez. Et je n'utilise pas de rouge à joues comme les audacieuses Italiennes !
- Tu n'en as pas besoin, intervint Stefan.
Katherine lui sourit, et le cœur du jeune homme se mit à battre la chamade. Elle était si belle !
- Quel dommage de ne pas te voir plus souvent, continua son père. Tu nous honores rarement de ta présence avant le crépuscule...
- C'est que je me consacre à l'étude et à la prière dans mes appartements, monsieur, répondit-elle en baissant les yeux.
Stefan savait bien qu'elle mentait. Il était le plus fidèle de son secret.
- Mais me voilà, maintenant.
- Oui, et c'est tout ce qui compte. Je vais donner des ordres pour fêter le retour de ton père. Damon... nous parlerons plus tard.
Giuseppe quitta la pièce, au grand plaisir de Stefan : il était rare qu'il puisse parler à Katherine hors de la présence de son père ou de Gudren, la robuste dame de compagnie allemande de la jeune fille. Il se tourna vers elle mais ce qu'il découvrit alors lui fit l'effet d'un coup de poing dans l'estomac. Katherine regardait Damon avec ce petit sourire complice qu'elle réservait à Stefan... La haine submergea aussitôt le jeune homme, jaloux de la beauté sombre de son frère : sa grâce et sa sensualité irrésistibles attiraient les femmes comme une flamme les papillons de nuit. Il aurait voulu se jeter sur lui pour le défigurer. Mais il dut se résoudre, impuissant, à voir Katherine, sa robe de brocard doré effleurant le sol carrelé dans un frou-frou, s'approcher lentement de Damon, qui lui tendait la main, un cruel sourire de victoire aux lèvres...
Stefan se détourna brusquement de la fenêtre. Ça ne servait à rien de rouvrir de vieilles blessures ! Machinalement, ses doigts partirent à la recherche de la chaîne dissimulée sous sa chemise. Il contempla à la lumière le petit anneau d'or qui y pendait. Cinq siècles étaient écoulés depuis sa fabrication mais il n'avait rien perdu de son éclat. Une seule pierre y était sertie un lapis-lazuli de la taille d'un ongle. Puis les yeux de Stefan se posèrent sur la bague qu'il portait au doigt ornée elle aussi d'un lapis. Son cœur se serra. Il avait beau essayer, il ne pouvait pas oublier le passé, ni Katherine. Il se refusait pourtant à se replonger dans les terribles événements qu'il avait affrontés : la souffrance pourrait le rendre aussi fou que le jour où il avait provoqué sa propre damnation.
Stefan regarda à nouveau par la fenêtre, posant son front contre la vitre pour en goûter la fraîcheur. Son tuteur lui répétait une autre expression : « La voie du mal permet parfois d'arriver à ses fins, mais pas de trouver la paix. » Il avait espéré trouver le repos à Fell's Church, mais, au souvenir de ces paroles, il comprit que c'était impossible, jamais il ne le connaîtrait, car le mal l'habitait.
Ce matin-là, Elena se leva plus tôt que d'habitude. Margaret dormait encore à poings fermés, recroquevillée dans son lit, tandis que tante Judith allait et venait dans sa chambre. Sans un bruit, elle se faufila dans le couloir et sortit.
L'air était frais et le cognassier abritait son habituel lot de geais et de moineaux. Elena regarda vers le ciel et prit une profonde inspiration : le mal de tête avec lequel elle s'était endormie avait disparu. Même si son appréhension ne s'était pas entièrement envolée, elle se sentait capable d'affronter Matt: ils devaient se retrouver avant les cours.
Le jeune homme habitait tout près du lycée, dans rue aux habitations identiques. Sa petite maison se différenciait seulement des autres par la balancelle un peu plus délabrée et la peinture un peu plus écaillée de la façade. Lorsqu'elle le vit sur le perron, Elena sentit, l'espace d'un instant, son cœur tambouriner comme autrefois. C'est vrai qu'il était très beau, de cette beauté respirant la santé : comme tous les joueurs de football, ses cheveux blonds étaient coupés courts, son teint hâlé par l'été passé à la ferme de ses grands-parents, et ses yeux bleus pleins d'honnêteté et de franchise. Ce matin, pourtant, ils étaient assombris par la tristesse.
- Tu veux entrer ? demanda-t-il.
- Non, je préfère marcher, répondit Elena.
Ils s'avancèrent sous les arbres qui bordaient la route. L'assurance habituelle d'Elena l'avait abandonnée: elle fixait le bout de ses chaussures sans savoir par où commencer.
- Alors, comment s'est passé ton voyage en France ? demanda Matt, visiblement mal à l'aise, lui aussi.
- Oh, c'était super ! répondit-elle avec un enthousiasme exagéré. Vraiment super ! Les gens, la nourriture... Tout était...
- Ouais, j'ai compris. Super. Matt s'arrêta, les yeux baissés sur ses vieilles baskets. Ils se redressèrent en même temps, et leurs regards se rencontrèrent enfin.
-Tu sais, tu es vraiment belle, ce matin, murmura Matt.
Elle allait répondre par une pirouette, mais il reprit immédiatement :
- Je pense que tu as quelque chose à me dire, non ? Il y eut un silence gêné, puis il sourit tristement écartant les bras. Elle se serra contre lui avec un soupir.
- Matt... Tu es le mec le plus génial que j'aie jamais rencontré, tu sais et... je ne te mérite pas.
- Ah, bon ! Et c'est pour cette raison que tu me jettes ? Parce que je suis trop bien pour toi... Ça paraît évident.
- Non, dit Elena, ce n'est pas pour ça, et je ne te jette pas. On reste amis, d'accord ?
- Bien sûr.
- Parce que c'est ce que nous sommes.
- De bons amis. Sois honnête, Matt : entre nous, il n'y a que de l'amitié, pas vrai?
Il détourna son regard.
- J'ai le droit de jouer mon joker ?
Lisant la déception sur le visage d'Elena, il ajouta :
- Ça n'aurait pas quelque chose à voir avec le nouveau, tout ça ?
- Non, dit-elle après une hésitation. Je ne le connais pas, on s'est même pas encore parlé.
-Mais tu en crèves d'envie... Non, ne dis rien, je ne veux pas le savoir.
Il lui passa doucement un bras autour des épaules.
- Allons-y. On a peut-être le temps d'acheter un beignet avant les cours.
Alors qu'ils s'éloignaient, un grand bruit retentit au- dessus de leur tête. Matt émit un sifflement.
- Waouh ! Regarde le corbeau ! J'en ai jamais vu d'aussi gros !
Quand Elena leva à son tour les yeux, l'oiseau s'était envolé.
Elena avait décidé de mettre son plan à exécution le jour même. Tous les détails étaient au point et elle n'avait plus qu'à réunir quelques informations sur Stefan Salvatore. La tâche s'avéra facile : les élèves ne parlaient que de lui. La nouvelle de son désaccord avec la secrétaire chargée des inscriptions, la veille, avait fait le tour de l'établissement, et le matin même, il avait été convoqué chez le directeur. Celui-ci l'avait renvoyé en classe (après, disait-on, un coup de fil de Rome - à moins que ce ne fut de Washington), et le problème semblait réglé. Officiellement, du moins.
Quand Elena arriva en cours d'histoire de l'Europe, l'après-midi, elle fut accueillie par les sifflements admiratifs de Dick Carter et Tyler Smallwood, qui se tenaient devant la porte. « Quels nazes, ces types ! se dit-elle en les ignorant royalement. S'ils croient que faire partie de l'équipe de foot suffit à les rendre irrésistibles... » Au lieu d'entrer dans la salle, elle sortit son poudrier en feignant de se refaire une beauté : le miroir lui permettait d observer à loisir le couloir derrière elle. Après avoir ses instructions à Bonnie, elle attendait en effet l'arrivée de Stefan. Pourtant, son stratagème fut inutile : à son grand étonnement, elle le sentit près d'elle sans l'avoir aperçu.
D'un mouvement brusque, elle referma son poudrier, s'apprêtant à l'arrêter. Mais il s'était raidi dans une attitude de défense : Dick et Tyler bloquaient l'entrée de la salle. « Les abrutis ! » pensa Elena en les fusillant du regard par-dessus l'épaule de Stefan.
L'air très content de leur coup, ils faisaient semblant de ne pas remarquer que leur camarade cherchait à entrer.
- Excusez-moi, dit-il du ton calme avec lequel il s'était adressé au professeur, la veille.
Dick et Tyler se regardèrent, puis firent mine d'examiner les alentours, comme s'ils venaient d'entendre des voix.
- Scousi ? demanda Tyler d'une voix de fausset Scousi mi ? Mi scousi ? Jacuzzi ?
Ils éclatèrent de rire. Elena vit la mâchoire de Stefan se contracter. S'ils se battaient, il n'avait aucune chance contre ses deux adversaires, bien plus grands et plus costauds que lui.
- Y a un problème ?
Elena se retourna, aussi surprise que Dick et Tyler de découvrir Matt. Son regard lançait des éclairs. Les deux fauteurs de troubles s'écartèrent lentement, à contrecœur, tandis qu'Elena laissait échapper un sourire. « Ce brave Matt... » pensa-t-elle. Il entra dans la salle avec Stefan et s'assit à côté de lui. Ah, mais non ! Ça changeait son plan ! Elle allait devoir attendre la fin du cours pour le mettre à exécution ! Déçue, elle se glissa derrière Stefan: elle pourrait l'observer sans être remarquée.
Matt faisait sonner des pièces de monnaie dans sa poche, comme à chaque fois qu'il cherchait un sujet de conversation.
-Heu, tu sais..., commença-t-il, mal à l'aise. Ces types...
Stefan eut un rire désabusé.
- Je n'ai pas à les juger. De toute façon, je n'ai aucune raison d'être le bienvenu ici.
Au-delà de l'amertume, Elena crut reconnaître dans sa voix un profond mal-être.
- Pourquoi est-ce que tu dis ça ? Écoute, tu parlais de foot hier, alors j'ai pensé que ça t'intéresserait : un de nos arrières s'est cassé un ligament et il nous faut un remplaçant. Les sélections se font tout à l'heure, après les cours. Ça te branche?
- Moi ? Heu... J'ai peut-être pas le niveau.
- Tu sais courir ?
- Est-ce que je sais... ?
- Oui.
Elena distingua un léger sourire sur le profil de Stefan.
- Tu sais esquiver ?
- Oui.
- C'est tout ce qu'on te demande. Si tu arrives à garder le ballon, tu as le niveau.
- Je vois.
Cette fois, Stefan souriait franchement, ce qui fit briller de joie les yeux de Matt. Un lien s'était visiblement crée entre les deux garçons, et Elena, s'en sentant exclue,éprouvait une vive jalousie. Mais l'expression de changea brusquement.
- Merci, dit-il, distant. Je ne peux pas. J'ai des engagements.
Le professeur commença son cours, durant Elena ne cessa de se répéter sa petite phrase : « Salut je m'appelle Elena Gilbert et j'appartiens au comité d'accueil. Je dois te faire visiter le lycée. » Au cas où elle sentirait de la résistance, elle avait l'intention d'ajouter un argument quasiment imparable, avec de grands yeux mélancoliques : « Tu sais, si tu refuses mon aide, je risque d'être mal vue... »
Au milieu du cours, on lui fit passer un mot sur lequel elle reconnut l'écriture ronde et enfantine de Bonnie : J'ai retenu C. le plus longtemps possible. Qu'est-ce qui s'est passé de ton côté ? Ça a marché ? Son amie, au premier rang, était tournée vers elle. Elena secoua la tête négativement en faisant en sorte que celle-ci lise ce message sur ses lèvres : « Après le cours. »
Il lui sembla qu'il s'était écoulé un siècle avant que M. Tanner ne les autorisât à sortir. Tous les élèves se levèrent en même temps. « C'est parti », se dit Elena. Le cœur battant, elle bloqua le chemin de Stefan, tout en pensant avec amusement qu'elle agissait exactement comme Dick et Tyler un instant plus tôt. Elle leva la tête, et ses yeux se retrouvèrent exactement à la hauteur des lèvres de Stefan.
Alors, ce fut le trou. Qu'est-ce qu'elle était censée lui dire, déjà ? Elle ouvrit la bouche et, après un blanc, s'entendit réciter sa tirade en balbutiant :
- Salut, je m'appelle Elena Gilbert et j'appartiens au comité d'accueil, on m'a chargée de...
- Désolé, j'ai pas le temps.
Elle n'en crut pas ses oreilles. Il ne l'avait même pas laissé terminer ! Elle s'obstina pourtant à achever sa phrase:
- ... Te faire visiter le lycée.
- Je regrette, je ne peux pas. Il faut que j'aille... aux sélections de foot.
- Il se tourna vers Matt, qui affichait un air surpris. Tu m'as bien dit que c'était juste après les cours ?
- Oui, mais...
- Alors je ferais mieux d'y aller. Tu peux me montrer où c'est?
Matt regarda Elena d'un air hésitant avant de se résigner:
- Heu, oui, sans problème. Suis-moi ! Ils laissèrent Elena seule au milieu d'un cercle de spectateurs. Caroline n'avait pas perdu une miette du spectacle. Sentant sa gorge se serrer et une sorte de vertige la gagner, Elena quitta précipitamment la salle : ces égards lui étaient insupportables.


4.


Elle courut à son casier, au bord des larmes. Elle referma sa porte en s'efforçant de les retenir et se dirigea vers la sortie.
C'était la seconde fois qu'elle rentrait directement du lycée, et sans personne pour l'accompagner, contrairement à ses habitudes. Heureusement que tante Judith n'était pas à la maison pour s'en inquiéter. Elle avait dû aller se promener avec Margaret. Elena en fut soulagée : elle pourrait enfin laisser couler ses larmes tranquillement. Pourtant, à présent qu'elle était seule, ses yeux restaient secs. Elle laissa tomber son sac dans l'entrée pour se diriger vers le salon.
C'était une pièce magnifique, impressionnante, pourvue d'une ravissante cheminée encadrée de colonnes tournées, qui, tout comme la chambre d'Elena, datait d'avant 1861.
Les deux seuls vestiges de l'incendie qui avait ravagé la maison pendant la guerre de Sécession. Le bâtiment avait été reconstruit par le grand-père d'Elena, et les Gilbert y avaient toujours vécu depuis.
La jeune fille contempla les hautes fenêtres dont les vitres anciennes, épaisses et irrégulières, déformaient légèrement ce qu'on voyait à travers. Elle se rappela le jour où son père lui avait fait observer ce phénomène. À cette époque, elle était encore plus jeune que Margaret.
Ce souvenir lui serra la gorge, mais ses larmes refusaient toujours de couler. Les sentiments les plus contradictoires l'envahissaient: elle se sentait abandonnée du monde entier tout en étant satisfaite de se retrouver seule. Elle avait beau essayer de réfléchir, ses pensées s'enfuyaient Elle se trouvait dans un tel état de confusion qu'elle se représentait ses idées sous la forme de rongeurs cherchant à échapper aux serres d'un hibou... Une suite d'images incohérentes se bousculaient dans son esprit. Hibou... rapace... Carnivore... corbeau... Elle se rappela alors les paroles de Matt : « Le plus gros que j'aie jamais vu. »
Ses yeux la piquaient. Pauvre Matt ! En dépit du mal qu'elle lui avait fait, il s'était montré aimable avec Stefan. Stefan... Elle sentit une boule se former dans sa gorge, et deux grosses larmes apparurent enfin au bord de ses yeux. Elle pleurait de colère, d'humiliation, et de frustration, et peut-être bien d'un autre sentiment encore dont elle ne connaissait pas la nature : ressentait-elle déjà quelque chose pour ce Stefan Salvatore, cet être si différent ?
Il représentait à la fois l'inconnu et un défi, ce qui le rendait irrésistible. Curieusement, c'était cet adjectif que les garçons employaient le plus fréquemment pour la qualifier. Elle apprenait souvent par la suite combien sortir avec elle les rendait nerveux, à tel point qu'ils en avaient les mains moites et l'estomac noué. Elena trouvait ces récits amusants, d'autant plus qu'aucun garçon ne l'avait jamais mise dans cet état.
Mais elle se rendit compte qu'en parlant à Stefan, elle avait eu le cœur battant, les genoux tremblants, les joues brûlantes, et si mal au ventre qu'elle avait manqué s'évanouir. Elle s'intéressait peut-être à lui parce qu'il l'intimidait. .. Non, ce n'était pas la seule raison... Sa bouche magnifique, à elle seule, la faisait frissonner de tout son corps. Sans compter ses cheveux de jais qu'elle rêvait de pouvoir caresser, son corps souple, élancé et musclé, ses longues jambes... et surtout, sa voix infiniment séduisante. Lorsqu'il s'était adressé à M. Tanner d'un ton détaché et méprisant, elle avait été subjuguée. Elle se demandait comment résonnerait son nom chuchoté par lui dans une note grave...
- Elena !
Elle sursauta, brusquement tirée de sa rêverie, non par Stefan, mais par Judith, qui l'appelait depuis l'entrée...
- Elena ? T'es là ? reprit Margaret de sa petite voix aiguë.
Elena ne voulait surtout pas apparaître devant sa tante les yeux mouillés et devoir lui fournir des explications en luttant contre de nouvelles larmes. Elle atteignit le jardin juste au moment où la porte d'entrée claqua, en réfléchissant à un endroit où personne ne pourrait la déranger Mais bien sûr ! Elle irait voir ses parents...
À pied, ça faisait un bout de chemin, mais depuis trois ans qu'elle l'empruntait, elle connaissait tous les raccourcis. Elle traversa le pont Wickery, monta au sommet de la colline, longea l'église en ruine, puis redescendit dans le petit vallon, de l'autre côté de la ville. Cette partie du cimetière était bien entretenue, contrairement à l'autre, plus ou moins laissée à l'abandon. L'herbe y était tondue, et des gerbes de fleurs ajoutaient des touches colorées à l'ensemble. Elena s'assit à côté de la grande pierre tombale sur laquelle étaient gravés ces mots : Famille Gilbert.
- Bonjour maman, bonjour papa, murmura-t-elle en déposant des impatients cueillies en route.
Elle venait régulièrement leur rendre visite depuis l'accident. À cette époque, Margaret n'avait qu'un an, si bien qu'elle ne se rappelait pas ses parents. Elena, elle, pleurait à l'évocation de ses innombrables souvenirs. Ils lui manquaient tant... Elle revoyait sa mère, si jeune et si belle, et son père, dont le coin des yeux se plissait lorsqu'il souriait...
Heureusement que tante Judith était là. Margaret et Elena avaient beaucoup de chance qu'elle eût quitté son travail pour venir s'occuper d'elles dans cette petite ville perdue. Son fiancé, Robert, serait même bientôt un quasi-beau-père pour sa petite sœur. Elena, quant à elle, se souvenait trop bien de ses parents : personne ne pouvait les remplacer. Peu après l'enterrement, elle était souvent venue déverser sa colère dans ce lieu. Comment avaient-ils été assez stupides pour se faire tuer dans un accident de voiture ? Elle ne s'était jamais sentie si seule au monde, plus encore qu'aujourd'hui, où elle avait trouvé sa place à Fell's Church. Pourtant, ces derniers temps, cette certitude avait été de plus en plus remise en question. Elle avait l'impression qu'un endroit où elle se sentirait immédiatement chez elle l'attendait...
Une ombre s'avança au-dessus d'elle. Elle leva les yeux, étonnée, et aperçut deux silhouettes vaguement menaçantes. Elle les fixa, pétrifiée.
- Elena, dit la plus petite, les mains sur les hanches. Tu m'inquiètes, tu sais !
Elena cligna des yeux et finit par laisser échapper un rire nerveux. C'était Bonnie et Meredith.
- Impossible d'être tranquille deux minutes..., bougonna-t-elle tandis qu'elles s'asseyaient à ses côtés.
- On peut partir, si tu veux, suggéra Meredith.
Elena haussa les épaules. Finalement, elle était plutôt contente de leur présence. Après l'accident, ses deux camarades étaient souvent venues la chercher à cet endroit : elle n'était pas gênée de leur montrer ses yeux mouillés, acceptant sans rien dire le mouchoir que lui tendait Bonnie. La réponse à ses interrogations lui apparut soudain : sa place était auprès des amies qui tenaient à elle, c'était aussi simple que ça ! Elles restèrent assises en silence à regarder le vent agiter les branches des chênes.
- C'est vraiment nul ce qui s'est passé tout à l'heure dit enfin Bonnie à mi-voix. Ça a dû te faire un sacré choc.
- On devrait t'appeler Miss Tact, l'interrompit Meredith. Faut pas exagérer, y a pire...
- Tu peux pas savoir, t'étais pas là, répliqua Elena. J'ai vraiment eu la honte de ma vie. Mais je m'en fous maintenant. De toute façon, il ne m'intéresse plus.
- Arrête !
- C'est vrai, je te jure. Ce mec se croit trop bien pour nous. Alors ses lunettes de chez Armatruc, il peut se les mettre où je pense...
Les deux autres pouffèrent.
- Au fait, il avait l'air de meilleure humeur, Tanner, aujourd'hui. Hein, Bonnie ? ajouta-t-elle en cherchant à détourner la conversation.
Cette dernière prit un air de martyr.
- Tu parles ! Il m'a mise en premier pour les exposés. Mais bon, ça m'est égal parce que je vais faire un truc sur les druides et...
- Sur les quoi ?
- Les druides. Tu sais, les types qui sculptaient des menhirs et faisaient de la magie, il y a super longtemps en Angleterre. Je descends d'eux, c'est pour ça que je suis médium.
Meredith étouffa un rire, mais Elena fronça les sourcils.
- Bonnie, hier, t'as vraiment vu quelque chose dans les lignes de ma main ?
- Je... je sais pas. J'ai cru, en tout cas. Souvent, je me laisse entraîner par mon imagination...
Elle m'a dit qu'on te trouverait là, intervint Meredith. Moi, je pensais aller voir à la cafèt', mais Bonnie m'a affirmé que tu étais dans le cimetière.
- Bon ? s'étonna Bonnie. C'est drôle, parce que ma grand-mère écossaise a des visions. Ça a dû sauter une génération.
- Sans compter que tu descends des druides, ajouta Meredith d'un ton ironique.
- C'est la pure vérité ! Ma grand-mère fait de ces trucs, vous le croiriez pas !
Elle tient ça d'eux... Elle peut te prédire avec qui tu vas te marier et quand tu vas mourir. Moi, elle m'a annoncé que je mourrais jeune.
- Arrête tes bêtises !
- Si, si. Je mourrai belle et jeune, c'est super romantique, non ?
- C'est surtout horrible, dit Elena.
Les ombres s'étaient allongées autour d'elles. Un petit vent frais était apparu.
- Et avec qui tu vas te marier, Bonnie ? demanda Meredith.
- Je sais pas. Ma grand-mère m'a expliqué comment l'apprendre, mais j'ai encore jamais essayé. Bien sûr, ajouta-t-elle d'un ton théâtral, il sera immensément riche, et beau comme un dieu, un peu dans le genre de Stefan, notre mystérieux inconnu... D'autant plus que, si personne n'en veut...
Elle jeta un regard malicieux à Elena, qui fit comme si de rien n'était.
- Je te verrais bien avec Tyler Swallwood, suggéra-t-elle d'un air innocent. Il paraît que son père est bourré de fric...
- Il est pas mal, renchérit Meredith. Mais, bon, faut c aimer les grandes dents blanches de carnivore...
Les trois filles éclatèrent de rire. Bonnie arracha une poignée d'herbe pour la lancer sur Meredith, qui lui renvoya un pissenlit. Cette irruption de joie rendit sa bonne humeur à Elena : elle était redevenue elle-même, Elena Gilbert, la reine du lycée de Fell's Church. Elle défit le ruban abricot qui retenait ses cheveux.
- Je sais sur quoi je vais faire mon exposé, déclara-t-elle brusquement tandis que Bonnie ôtait les brins d'herbe de ses boucles.
- Sur quoi ?
Elena renversa la tête pour contempler le ciel embrasé de tons rouges et mauves, au-dessus de la colline. Elle inspira profondément, laissant planer le suspense, avant de répondre d'un ton désinvolte :
- Sur la Renaissance italienne.
- Bonnie et Meredith la fixèrent, bouche bée, puis se regardèrent. Elles s'esclaffèrent.
- Ha, ha ! La tigresse est de retour, dit enfin Meredith.
Elena lui lança un sourire de prédateur. Elle ignorait comment elle avait retrouvé son assurance, mais ça lui était égal. Elle était obsédée par une pensée : ne faire qu'une bouchée de Stefan Salvatore...
- Bon, écoutez-moi, toutes les deux. Personne ne doit être au courant de ce que je vais vous dire, sinon, tout le lycée va se foutre de moi, y compris Caroline, qui pourrait profiter de la situation. Ce mec, je le veux toujours, et je l'aurai, comptez sur moi. Je ne sais pas encore comment je vais m'y prendre, pour l'instant, mais en attendant, on va l'ignorer.
- On?
- Parfaitement, on. Mais il est à moi, t'as compris Bonnie ? Je dois pouvoir te faire entièrement confiance.
- Attends, dit Meredith en ôtant la broche qui ornait son chemisier. Elle s'en piqua le pouce.
- Bonnie, donne-moi ta main, reprit-elle.
- Pourquoi faire ? s'inquiéta cette dernière.
- Parce que je veux t'épouser, andouille !
- Mais... Ah, d'accord ! Aïe !
- A toi, Elena.
Meredith piqua le doigt de son amie et le pressa pour en faire sortir une goutte de sang.
- Maintenant, on va serrer nos pouces les uns contre les autres en prêtant serment. Surtout toi, Bonnie. Jure de garder le secret et de faire tout ce qu'Elena te demandera au sujet de Stefan.
- Hé, mais c'est très dangereux de faire un pacte de sang,protesta très sérieusement Bonnie. Ça veut dire qu'il faut respecter sa promesse quoi qu'il arrive. Je dis bien quoi qu'il arrive !
- Je sais, répondit Meredith du même ton. C'est pour ça que je te le demande. Je n'ai pas oublié ce qui s'est passé avec Michael Martin.
Bonnie fit la grimace.
- Mais c'était y a longtemps, ça ne compte pas... Bon, allez, d'accord, je jure de garder le secret et de faire tout ce qu'Elena me demandera au sujet de Stefan.
Meredith répéta le serment. Puis Elena, après avoir contemplé leurs pouces réunis, prit la parole :
- Et je jure de ne pas renoncer à mon projet : Stefan m'appartiendra, quelles que soient les difficultés.
Le crépuscule avait noyé le paysage dans l'obscurité, apportant avec lui une bourrasque froide qui balaya les feuilles mortes du cimetière. Bonnie frissonna. Toutes les trois se mirent à rire nerveusement en prenant conscience du lieu où elles se trouvaient.
- Il fait nuit ! s'étonna Elena.
- On ferait mieux d'y aller, suggéra Meredith en remettant sa broche.
Bonnie se leva en léchant son pouce, aussitôt imitée par les deux autres.
- À bientôt, murmura Elena à l'adresse de la tombe en y déposant son ruban. Rentrons, dit-elle à ses amies.
Elles descendirent silencieusement jusqu'à l'église en ruine. Leur pacte les avait plongées dans une atmosphère un peu fantastique, à tel point que Bonnie ne put s'empêcher de trembler de nouveau. Était-ce le froid qui en était la cause ou bien le murmure du vent agitant sinistrement tes feuilles des chênes ?
- Je gèle, dit Elena en s'arrêtant devant les vestiges de l'église.
En bas de la colline, les trois amies distinguaient à peine, dans la nuit sans lune, l'ancien cimetière où étaient enterrés les soldats de la guerre de Sécession. Les pierres tombales de granit y étaient envahies par les mauvaises herbes, et le lieu ne donnait pas envie d'y flâner trop longtemps. Elles devaient pourtant le traverser pour rentier chez elles.
- Déjà que je n'aime pas m'y promener le jour... alors la nuit, n'en parlons pas, murmura Elena, qui avait perdu une bonne partie de son assurance.
Elle avait la sensation que les vivants n'avaient plus rien à faire dans cet endroit.
- On peut faire le tour, si vous voulez, proposa Meredith, mais ça va nous prendre vingt minutes de plus.
- Moi, ça m'est égal de passer par-là..., dit Bonnie en déglutissant. J'ai toujours voulu être enterrée dans le vieux cimetière...
- Arrête un peu de parler de ton enterrement ! lâcha Elena avec exaspération, avant de s'engager dans la descente.
À mi-chemin, prise de crainte, elle laissa Bonnie et Meredith la rattraper. Lorsqu'elles atteignirent ensemble la première tombe, son cœur se mit à battre à tout rompre. Elle avait beau essayer de se raisonner, elle ne pouvait s'empêcher d'avoir la chair de poule.
En effet, elle entendait les moindres petits bruits résonner au centuple ; crissement de leur pas sur le tapis de feuilles mortes était devenu assourdissant. L'église n'était plus qu'une sombre silhouette derrière elles. Elles continuaient leur progression sur l'étroit chemin bordé de pierres tombales, dont la plupart les surplombaient de quelques centimètres. Elena, scrutant chacune d'entre elles, constata qu'elles étaient assez hautes pour cacher quelqu'un. Soudain, son regard s'arrêta sur une statue qui gisait par terre. C'était un petit ange décapité, dont la tête était posée à côté du corps. Ses grands yeux contemplaient le vide.
- Pourquoi on s'arrête ? demanda Meredith devant l'air fasciné d'Elena.
- Je ne sais pas... je voulais juste..., murmura Elena.
Enfin, elle parvint à détourner les yeux de la statue, mais ce qu'elle vit alors la pétrifia.
- Bonnie ? Bonnie ? Qu'est-ce qui se passe ?
Son amie, toute raide, la bouche entrouverte et le regard perdu dans le vague, semblait elle-même changée en statue.
- Bonnie ! Arrête, c'est pas drôle ! se plaignit Elena
Mais Bonnie ne répondit pas.
- Bonnie ! intervint Meredith.
Elena, comprenant qu'il se passait quelque chose d'anormal, se mit à courir droit devant elle. Mais une exclamation monta derrière elle, l'obligeant à faire volte- face.
- Elena !
Bonnie,pâle comme la mort, toujours figée, et les yeux scrutant le vide, laissait échapper une voix qui n'était pas la sienne
- Elena ! Quelqu'un est là qui t'attend, proclama Bonnie qui se tourna enfin vers elle.
Elena crut apercevoir quelque chose remuer derrière les pierres tombales. Elle hurla, aussitôt imitée par Meredith, et, sans réfléchir, toutes deux se mirent à courir bientôt suivies de Bonnie, criant à son tour. Elena dévala à toute allure l'étroit sentier, malgré les cailloux et les racines qui la faisaient trébucher. Elle entendait le halètement de Bonnie derrière elles, et le souffle court de Meredith, d'ordinaire si calme et si cynique... Tout à coup, un bruit dans le feuillage, accompagné d'un cri lugubre, leur fit accélérer la course.
- Y a quelque chose qui nous suit ! hurla Bonnie.
- Il faut arriver au pont, cria Elena, malgré le feu qui lui brûlait les poumons.
Elle avait l'intuition qu'après le pont, elles seraient en sécurité.
- Mais cours, Bonnie ! Cours ! Ne regarde pas derrière toi ! dit-elle en attrapant son amie par la manche.
- J'en peux plus, gémit Bonnie, pliée en deux par un point de côté.
- Mais si, tu peux ! Allez cours !
Elena distingua la première les reflets argentés du cours d'eau éclairé par la lune, enfin levée : le pont n'était plus très loin. Il ne fallait pas fléchir, se disait-elle, en luttant contre l'impression que ses jambes ne la soutiendrai pas jusqu'au bout. Elle voyait distinctement le pont main tenant, il n'était plus qu'à quelques mètres.
- Ça y est, haleta Meredith, on est arrivées.
- T'arrête pas, surtout ! Traverse ! reprit Elena.
Elles atteignirent l'autre berge en faisant craquer les vieilles planches sous leur pas. Alors seulement, Elena lâcha la manche de Bonnie.
Meredith, recroquevillée, les mains sur les cuisses, essayait de reprendre sa respiration. Bonnie pleurait.
- Qu'est-ce que c'était ? Hein, qu'est-ce que c'était ? demanda-t-elle.
- Je croyais que c'était toi le médium, répondit Meredith. Allons-nous en !
- C'est plus la peine, tout va bien, maintenant, murmura Elena.
Elle avait les larmes aux yeux et tremblait de tout son corps. Néanmoins, elle constata avec soulagement que le souffle chaud dans son cou - qui l'avait poursuivie jusqu'au pont - avait disparu. La rivière semblait former une barrière de protection contre le danger qui les guettait de l'autre côté.
- Ce truc ne peut pas nous suivre jusqu'ici, ajouta-t-elle.
Meredith la regarda, puis se tourna vers l'autre rive plantée de chênes, et enfin vers Bonnie. Elle laissa échapper un petit rire nerveux.
- C'est sûr, on risque plus rien. Mais bon, on va pas passer la nuit là, non ?
Elena eut alors un étrange pressentiment :
- Non, pas ce soir..dit-elle. Elle passa un bras autour des épaules de Bonnie, qui sanglotait toujours.
- Tout va bien, Bonnie, tu n'as plus rien à craindre, maintenant. Viens.
Meredith scrutait de nouveau l'autre côté.
- Le pire, c'est que tout a l'air calme, là-bas, dit-elle d'une voix plus posée. Peut-être qu'on s'est fait peur toutes seules... On a dû paniquer, c'est tout, et la transe de Bonnie n'a rien arrangé... Y avait sûrement rien...
Elena ne répondit pas, et les amies reprirent silencieusement leur chemin. Pourtant, elle n'avait pas fini de se torturer l'esprit.


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